Un coup de fil.....

Hier,en ce début d'automne ou plutôt en cette fin d'été, il fait chaud et je profite de la fraîcheur que procure un énorme noyer au fond du jardin. Je commençais à m'endormir quand le téléphone me réveille..
Je reconnais tout de suite, au bout du fil, la voix de P., il pleure tellement qu'il a du mal à parler. P.est un vieil ami, malade alcoolique et qui a arrêté de boire il y a trois mois après un sevrage hospitalier. Il est dépendant physiquement.
A travers ses larmes j'arrive à comprendre, qu'il est nul, archi nul, qu'il ne mérite pas qu'on s'intéresse à lui, qu'il ne s'en sortira jamais, que c'est un bon à rien qui a toujours tout gâcher dans sa vie...Bref, en résumé, il vient de boire deux bières fortes et une bouteille de rosé….
Tout d'abord, je lui demande de se calmer car j'ai du mal à comprendre ce qu'il me dit. Avec quelques reniflements, il me raconte qu'il n'a pas pu résister que depuis ce matin il ne pense qu'à l'alcool, qu'à la bière bien fraîche qui est dans son frigo, et que n'en pouvant plus, et bien il a bu tout ce qu'il avait chez lui, les bières et le rosé.
Tout d'abord je le rassure sur sa nullité en lui disant que non, ce n'est pas un bon à rien, c'est juste un malade alcoolique et que là, l'alcool a eu le dessus, ce qui arrive assez fréquemment, surtout en début d'abstinence.
Je lui dis aussi qu'il a bien fait de m'appeler, mais que c'est avant de boire le premier verre que son coup de fil aurait pu être efficace. En discutant avec lui, il aurait pu prendre du recul face à cet envie impérieuse de boire et nous aurions cherché comment il pourrait faire pour éviter de prendre ce verre...Il en convient ,mais me dit qu'il n'a pas osé…
Première leçon a en tirer, appeler quelqu'un, oui, mais avant de boire, après ça ne sert plus à grand-chose, quoique c'est tout de même une aide importante.
Je lui demande ce qui l'a poussé vers la bouteille. Il me dit qu'il a eu des soucis au boulot, qu'il s'est fâché avec sa femme et qu'il faisait tellement chaud qu'il mourrait de soif.
Là aussi, on reparle des émotions comme celles qu'il a vécues, la colère, la sensation d'être rejeté par sa femme, le besoin de remonter et d'oublier ce qui venait de se passer. A part qu'il a choisi la plus mauvaise solution pour arriver à ça, boire….Ces verres n'ont réglé aucun problème , au contraire ils ont même compliqué une situation déjà pas claire… Il en convient et me demande ce qu'il peut faire maintenant.
Mon seul conseil c'est de lui demander de virer tout l'alcool qu'il a chez lui, s'il faut qu'il aille en acheter, ça complique tout de même les choses, ensuite de m'appeler ou d'appeler quelqu'un d'autre quand l'envie d'alcool est là mais avant de la satisfaire, et ensuite de penser que les émotions ne se résolvent pas dans l'alcool.
Par contre, il n'est pas le seul à connaître une réalcoolisation, s'il s'arrête là, ce n'est pas une rechute, ce ne sera qu'une réalcoolisation, un caillou qui était sur son chemin et qu'il n'a pas pu éviter. Alors il reprend le zéro alcool en ne pensant qu'à la phrase magique "aujourd'hui, je ne bois pas, demain n'existe pas…" et il reprend sa route là où il en était.
Je lui conseille de reprendre rendez vous avec son alcoologue et lui demande de me tenir au courant.
On peut tirer plusieurs leçons de cet incident:
-ne pas avoir d'alcool chez soi
-appeler avant de boire le premier verre
-trouver de l'aide le plus vite possible et repartir aussitôt dans le zéro alcool
-ne jamais attendre d'avoir soif, c'est aussi une des causes qui conduit souvent à l'alcool, surtout quand il fait chaud.
-penser à se faire aider à nouveau pour continuer le travail sur les émotions qui sont toujours très difficiles à gérer pour un malade alcoolique…

Et vous en cas de réalcoolisation, quelle serait votre première réaction?

Ah cette fameuse gestion des émotions! un soucis, une contrariété, une dispute, enfin tout ce qu'il ne va pas et le seul remède qu'on a c'est la bouteille.
Quand je suis rentrée de post-cure on nous avait bien dit de ne jamais avoir une goutte d'alcool chez soi. J'ai donc voulu tout virer! Sauf qu'en fin de compte j'en avais tellement caché partout que je me suis retrouvée avec mon ami qui avait des yeux ébahis et complètement dépassés par l’ampleur de toutes mes cachettes. Il y avait quand même 23 bouteilles pleines et je ne vous dis pas le nombre de vides, je me disais toujours faut que je les vire pour en remettre des pleines! Donc on en a fait cadeau à des copains, ravis qui n'ont pas trop bien compris sur le moment. Après je leur ai expliqué que je n'en aurais plus besoin. Donc pas une goutte d'alcool à la maison, et mon ami même s'il est abstinent de par sa religion (musulman) qu'il ne pratique pas, mais bon...a très bien compris. Maintenant quand je reçois des amis on en sert à table, et c'est moi qui les vide une fois qu'ils sont partis, on ne sait jamais ce qui pourrais me passer par la tête et puis ça me fait plaisir, je dois être maso!!!
Après j'ai toujours avec moi mon numéro "fétiche" que vous retrouvez dans ma signature. J'ai fait appel à eux un soir de gros craving, heureusement que je n'avais pas d'alcool, en pyjama et la flemme de sortir encore que...c'était pas ça qui m'arrêtait avant. J'ai eu une écoute tellement bienveillante d'une personne sans doute plus âgée que moi, sans jugement, qui même quand je me taisais parce que je pleurais attendait elle aussi, en silence que je reprenne un peu mes esprits. Alors , je préfère appeler si jamais ça se reproduisait , on n'est qu'en rémission nous autres MA, et bien j'appellerai ce numéro qui a une réelle bienveillante écoute anonyme.
Et je recommencerai, ou continuerai le lendemain mon abstinence, et j'en parlerai dès que possible à mon alcoologue, afin d'arriver à comprendre la cause et d'éviter de me retrouver dans la même situation à l'avenir.

Je pense que je m'isolerai. Car personne à appeler au tel de confiance capable de comprendre.

Nous n'avons pas "d'amis" ici et nos familles sont aux abonnés absents.

Et les gens te fuis quand tu dis que tu as un problème.

Shale tu es une exception de pouvoir entendre les gens, c'est une grosse qualité, qui se perd de nos jours.

Oui, je donne mon portable à ceux qui me le demande ou à ceux que je sens en avoir besoin et effectivement on peut m'appeler mais pas en pleine nuit, car je ne suis pas toute seule dans la maison et je ne tiens pas à réveiller mon compagnon...Mais sinon je suis joignable pour aider dans la mesure où je peux...

En cas de réalcoolisation,je crois que j'aurais en premier lieu honte et je pense que je le cacherai,je parle des premières minutes,ensuite,je pense que j'appellerai ma meilleure amie qui connait très bien mon problème.Après,il faut voir aussi ce qui a pu me faire boire de nouveau,sans doute quelque chose de très grave parce que l'alcool ne fait plus du tout partie de mes solutions,alors si j'en arrive à cette extrême,c'est sans doute que quelque chose de terrible me serait arrivé.En fonction du problème,je trouverai la solution pour me sortir de là: alcoologue,cure ou juste CSAPA ...

Ok Cristal, tu as de la chance d'avoir une amie qui comprenne

balou a écrit:Ok Cristal, tu as de la chance d'avoir une amie qui comprenne

Balou    t'es plus seul!!!

oui merci juste merci

balou a écrit:oui merci juste merci

T'aurais été chez les AA , j'aurai été ta marraine, mais ici c'est encore mieux qu'eux!!! et tu as la crème des crèmes pour t'écouter et ça tu le sais sans jugements et toujours t'élever te tirer vers le haut! l'abstinence heureuse, épanouie! ce qui est tellement difficile pour nous MA à retrouver