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Message  SHALE 17/1/2022, 11:04

Je n'oublierai jamais ce matin, de mai,  il y a plus de vingt ans, le matin qui m'a vu revivre après des années d'enfer.
N'ayant plus aucune autre solution pour me sortir de l'alcool, j'étais dépendante physique, je m'étais décidée, difficilement, il m'avait fallu au moins deux ans pour y arriver, à partir en cure.
Il y avait donc une quinzaine de jours que j'étais dans cet établissement pour malades alcooliques, on m'avait supprimé peu à peu tous mes médicaments et tout de suite l'alcool, bien entendu.
J'avais passé une dizaine de jours à ne penser qu'à boire un verre, le sevrage s'était plutôt bien passé, nous étions sous perfusion deux heures par jours pour nous réhydrater et nous avions des piqûres de magnésium pour faciliter le sevrage. Le sevrage alcool ne m'a pas posé de problème, il faut dire que nous étions très entourés et par du personnel infiniment gentil, spécialisé en alcoologie. Le sevrage médicaments a été beaucoup plus dur, je pensais que je n'arriverais plus à dormir, que les angoisses ne disparaîtraient jamais. Bref, j'avais le moral au plus bas et plus d'alcool pour me redonner de l'énergie.
Et pourtant, un matin, vers le vingtième jour de la cure, je me suis réveillée en pleine forme. J'avais une envie de vivre incroyable, l'envie de dévorer le monde….Je riais et je pleurais toute seule….J'avais l'impression de me retrouver enfant quand on se levait avec l'empressement de découvrir ce qu'allait nous apporter le jour nouveau.
Je me précipitais à la fenêtre, le jour se levait et je n'avais plus le souvenir d'avoir vu quelque chose d'aussi beau…..Les plantes, les maisons peu à peu retrouvaient des formes nettes au fur et à mesure que la nuit s'effaçait….Je me douchais vite fait, m'habillais avec le seul pull de couleur que j'avais car je ne portais plus que du noir depuis longtemps, espérant dissimuler le poids que j'avais pris avec l'alcool.
Je fonçais au réfectoire me faire un café et j'avalais quasiment une demie baguette…..La joie de vivre ne me quittait pas et l'équipe soignante s'en est aperçu très vite….Mais personne n'est venu m'en parler, ils me laissaient découvrir ce nouveau monde qui s'ouvrait devant moi….
La cure s'est poursuivie, j'ai fini en psychothérapie de groupe par régler quelques problèmes que je traînais encore comme de vieux boulets; Tout me semblait merveilleux, je regardais ce qui m'entourait avec des yeux tout neufs. Mes collègues de cure ne comprenaient pas ce qui se passait car il n'avait pas eu la chance que j'ai connue. Ils avaient encore beaucoup de cravings et d'angoisses…..
Le psy m'a dit que ce que je vivais se produisait parfois avec des alcooliques qui avaient été très loin dans l'alcool ,ce dernier les ayant déprimés à un point tel qu'ils n'arrivaient plus à prendre le dessus. Dans ce cas là, à l'arrêt de l'alcool, les dopamines reviennent très vite.
Mais je maintiens que j'ai eu beaucoup de chance, car en fait je suis sortie de cure, complètement hors alcool.
J'ai vécu l'été qui arrivait comme le plus bel été de ma vie, il en a été de même pour Noël. Je revivais tout comme si c'était la première fois, avec des yeux d'enfant émerveillé.
Maintenant, ça fait plus de 20 ans; la période rose qui a duré pas mal de temps, un ou deux ans , a été remplacée par une sérénité très agréable aussi……Je voulais vous faire part de cette partie de ma vie pour vous dire que rien n'est jamais perdu et de ne pas hésiter à aller en cure….
SHALE
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